Un samedi après-midi d’octobre, alors que la température était très clémente, mon fils Adrien et moi, nous nous affairions au nettoyage du potager.
Tout était très calme. Nous n’avions pour seule compagnie que le gazouillis des oiseaux et les vols de palombes très nombreuses en cette période de démarrage de la chasse. Une discipline très prisée dans notre région…
Alors qu’Adrien et moi étions penchés vers la terre, une palombe vint raser nos têtes à tour de rôle, au point d’effleurer nos cheveux. Nous nous redressâmes. La palombe se posa entre Adrien et moi alors que nous étions à 3 ou 4 mètres l’un de l’autre.
Tous deux très centrés, Adrien me fît part qu’elle voulait se poser sur sa tête. Je confirmai en ajoutant qu’elle avait besoin d’aide.
Il y avait de petits temps de pause entre nos échanges. La palombe d’un mouvement d’aile alla se poser sur une branche basse du figuier. Je reçus à ce moment qu’elle était de sexe masculin.
Adrien lui dit silencieusement qu’elle était la bienvenue sur sa tête. Et moi que nous allions l’aider.
Après quelques aller-retours entre le sol et le figuier, la palombe se posa sur la tête d’Adrien.
Je lui demandai de quelle façon je pouvais l’aider. Elle me dit qu’elle était gênée à la patte et je reçus une impression de serrement.
Mon fils étant bien plus grand que moi, je ne voyais pas. Je lui demandai alors de se baisser doucement pour être à ma hauteur.
Effectivement, un fil très serré entourait l’une de ses pattes sur plusieurs tours et entre les doigts. Il rentrait presque dans la peau.
Je lui expliquai alors que pour ôter ce fil, il fallait qu’elle accepte que je la prenne dans mes mains. Je sentis son approbation et je pris l’oiseau qui se laissa manipuler avec beaucoup de patience. D’autant plus que ce fil était extrêmement résistant et je craignais de la blesser. Je dus trouver un objet coupant et fin.
Eurêka ! Un coupe-peau ! Adrien s’empressa d’aller chercher l’objet qui nous permit de dégager la patte avec patience et douceur.
Après cela, nous relâchames la palombe qui nous conta sa vie d’appeau.
Elle était née dans une maison et nourrie par les hommes. Elle vécut attachée jeune. Et bien évidemment, ses cris attiraient les autres palombes qu’elle rêvait de rejoindre… Jusqu’au jour où, à force de tirer, le fil cassa.
C’est ainsi que cette palombe vint solliciter notre aide.
Elle me fit part de sa difficulté à voler haut et longtemps. Elle avait besoin de prendre des forces. Je lui offrais l’hospitalité de notre jardin et des alentours où personne ne viendrait la chasser. Elle me dit que son souhait était de rejoindre ses congénères dès que possible.
Elle se posa à nouveau sur la tête d’Adrien puis au sol, puis dans le figuier.
Je lui proposai de l’eau et des graines pour les oiseaux du ciel qu’elle bouda. Elle attendait quelque chose de mou et tiède. Je fis tremper du son d’avoine avec de l’eau tiède qu’elle picora.
Adrien lui installa un nichoir dans le figuier avec sa nourriture et de l’eau.
Elle testa ensuite son vol d’un arbre à l’autre pendant quelques heures puis d’endormit dans un des arbres.
Le lendemain, elle n’était plus là mais nous eûmes sa visite durant 3 jours d’affilée et cette fois, elle vint (il devrai-je dire) accompagnée.
Depuis des palombes viennent se poser de temps en temps sur les piquets de clôture autour du potager comme pour nous faire un clin d’oeil.
Autant vous dire que cet après-midi là, le travail au potager n’a guère avancé. Mais nos coeurs étaient remplis d’allégresse et de joie.
Le lendemain, je me rendis chez Pierrot, 90 ans, un être exceptionnel ! Et lui racontai l’histoire. Pierrot me confirma comment sont élevés les appeaux dans les palombières et il avait même entendu un chasseur se plaindre d’avoir perdu un appeau… Mais chuutttt, Pierrot a toujours aimé et protégé les animaux et déteste la chasse !